L'enregistrement multiple sous différentes entités ou avec différentes adresses emails est une expérience que nous vivons tous les jours.

Et, selon de récentes études américaines, ce phénomène, qui pouvait de prime abord sembler uniquement le fait de professionnels Internet, constitue un véritable mouvement de masse.

La population mondiale d'internautes (source IDC) s'élèvera à 361 millions à la fin de cette année.

Or, dans le même temps, si l'on additionne les nombres d'abonnés affichés par les 5 plus grands portails ou fournisseurs d'accès (AOL, Yahoo, Hotmail, Excite et Lycos), on arrive au chiffre de … 529 millions de personnes !

Cela signifie donc clairement que l'enregistrement multiple est devenu une réalité marketing incontournable.

Longtemps, les sites Web, dont la valorisation est justement fondée sur ce nombre d'abonnés (portails, sites de communauté, fournisseurs d'accès), ont cherché à minimiser le problème, en orientant leur discours sur un "raisonnement" apparemment cohérent : "plus les internautes qui nous visitent engagent de relations avec nous, et l'abonnement à notre service (abonnement à une newsletter par exemple) en constitue un exemple remarquable, plus ces internautes nous font confiance, plus nous les connaîtront et plus ils accorderont un niveau de confiance élevé à la publicité qu'on leur fera parvenir".

Cela explique que ces sites fassent... payer plus cher la publicité ciblée vers ces internautes que la publicité sous forme de simples bannières par exemple.

Or, aujourd'hui, c'est cet édifice qui se trouve fortement ébranlé par ce phénomène de masse de l'enregistrement multiple.

Si l'internaute s'enregistre aussi facilement de manière répétée sur un même site ou sur des sites concurrents, je pense qu'il ne faut y voir aucune malice de sa part, cela est simplement dû au fait que cet acte d'enregistrement est très différent lorsqu'il se déroule on ou off line.

Une adhésion à un club ou à un service dans le monde traditionnel suppose en effet une véritable démarche d'engagement personnel fort (visite à un magasin ou réponse à un courrier, souvent demande d'une cotisation symbolique).

La situation est tout à fait différente sur le Web :

• L'internaute, qui ne connaît pas personnellement les promoteurs du service, ne se sent aucune obligation envers ces derniers.
  
  
• Le passage à l'acte est beaucoup plus rapide qu'off line car le niveau de motivation pour s'inscrire on line n'a pas besoin d'être aussi fort qu'en off-line.
  
  D'ailleurs, souvent les internautes s'inscrivent à un site Web uniquement pour "voir".
  
  
• Autre phénomène, l'oubli des mots de passe.
  
  La démultiplication des sollicitations, promettant un avantage immédiat, invite l'internaute à multiplier les abonnements, et donc la mémorisation des mots de passe. Or l'internaute ne peut pas en retenir un nombre infini.
  
  Je pense qu'il serait intéressant qu'un jour une étude se penche sur ce véritable marché des mots de passe dans l'esprit des internautes.
  
  On pourrait ainsi mesurer la " part de marché mot de passe " qu'aurait réussi à acquérir chaque site Web chez l'internaute !
  
  
• Au fur et à mesure que les internautes s'aguerrissent dans leur usage du Web, ils apprennent à se servir de plusieurs adresses emails pour segmenter leur vie sur le Web (une adresse professionnelle, une adresse privée confidentielle pour les proches ou les services à forte valeur ajoutée, une ou plusieurs adresses privées pour les sites de moindre importance, etc…).
  
  Cela facilite donc les enregistrements multiples.

Pour de nombreux sites Web, le résultat est évident : de nombreux comptes clients ne sont plus actifs et "meurent" peu à peu (lorsque le compte, laissé en déshérence par son propriétaire, est fermé par Hotmail, Yahoo et autres Caramail, parce que la boîte aux lettres déborde par exemple).

Toutefois, entre un état présent d'inactivité et la liquidation effective du compte, il peut se dérouler de nombreux mois pendant lesquels le site continue à valoriser l'adresse de l'internaute.

Aux Etats-Unis, les annonceurs commencent à prendre en compte le phénomène et exigent désormais des sites Web qu'ils nettoient leur base avant d'aller plus loin. La confiance du marché est à ce prix.

Comme souvent, Yahoo! a pris l'initiative de procéder à cette purge et les résultats sont à la hauteur de ce qu'on pouvait craindre. Lors de ses dernières publications de résultats, Yahoo ! affirmait compter 185 millions de clients enregistrés.